Comment ‘Debí Tirar Más Fotos’ de Bad Bunny a-t-il conquis les classements musicaux ?

Pochette de l'album ‘Debí Tirar Más Fotos’
À ce stade de sa carrière, battre des records ne suffit plus à Bad Bunny. En 2020, il est devenu le premier artiste à atteindre le sommet du Billboard 200 avec un album entièrement en Espagnol. Il reste à ce jour le seul artiste à avoir réalisé cet exploit, non pas une , ni deux, mais bien quatre fois.
Son nouvel album, Debí Tirar Más Fotos, a passé trois semaines consécutives en tête du Billboard 200. En termes de longévité, c’est d’ores et déjà son deuxième plus gros succèsn derrière Un Verano Sin Ti (2022) qui y avait trôné pendant 13 semaines non-consécutives.
Cette semaine, Debí Tirar Más Fotos occupe également la première place du Top Latin Albums de Billboard, tandis que le titre DtMF occupe la première place du Billboard Global 200 pour la deuxième semaine consécutive. Ainsi, Bad Bunny occupe plus de la moitié du top 10 du Global 200. Dans le classement Hot Latin Songs de Billboard, neuf des dix premières chansons lui appartiennent, avec DtMF à la première place.
C’est un exploit rare, même pour un artiste du calibre de Bad Bunny. Il convient également de noter que Debí Tirar Más Fotos a débuté à la deuxième place du Billboard 200 après une semaine de lancement incomplète, en raison de la sortie de l’album un dimanche. Ce 5 janvier avait une signification particulière : le lendemain se déroulait la célébration de l’Épiphanie (Jour des Rois), une fête très importante à Porto Rico, reflétant ainsi l’amour qu’il porte à son île.
Ce retard a rapidement été comblé par une série de choix marketing ciblés, des États-Unis à Porto Rico. Il a ainsi co-animé The Tonight Show aux côtés de Jimmy Fallon, joué un concert surprise dans une station de métro à New York, co-animé une émission de nouvelles du matin à Porto Rico et surpris le podcaster local Chente Ydrach avec une parranda traditionnelle porto-ricaine. Le point d’orgue de la stratégie de Bad Bunny a été l’annonce d’une résidence de 21 dates au Coliseo de Porto Rico, dont plusieurs exclusivement réservées aux résidents de l’île.
L’un des personnages clés de cette stratégie est Monica Jiménez, directrice du marketing et des partenariats au sein de la division Bad Bunny chez Rimas Entertainment.
Avant de rejoindre le label de Bad Bunny, Monica Jiménez a travaillé avec des marques telles que Coty et Procter & Gamble. Elle collabore étroitement avec Noah Assad, le PDG de Rimas, sur tous les aspects de la carrière de Bad Bunny. Elle a aussi joué un rôle déterminant dans la réalisation de la vision de l’artiste.
Quel a été votre rôle dans le lancement de cet album ?
L’un de mes rôles clés a été de comprendre et de donner vie à sa vision. Benito (prénom de Bad Bunny) est un artiste qui s’investit pleinement dans tous les aspects du processus de lancement, y compris le marketing, et il est essentiel de concrétiser ses idées créatives.
Je rassemble généralement les pistes lancées par notre équipe, tout en cherchant de nouvelles stratégies innovantes pour garantir un plan solide et efficace. Au-delà de la simple exécution, mon rôle est de m’assurer que le lancement respecte l’identité artistique de Benito et communique efficacement l’essence et le message du projet.
Justement, quel était ce message ? Et quelle stratégie en a découlé pour l’album ?
La stratégie était de raconter une histoire, à travers la nostalgie et de transmettre un message d’amour et d’appréciation de notre éducation. Avec cet album, nous avons mis en avant notre fierté pour Porto Rico et nous voulions que le monde entier la ressente. Je pense que c’est ce qui a créé cette connexion si spéciale entre l’album et ses auditeurs.
Nous arrivons à une troisième semaine consécutive à la première place du Billboard 200, plus que n’importe quel autre album de Benito, à l’exception de Un Verano Sin Ti. À quoi attribuez-vous ce succès ?
Debí Tirar Más Fotos a été un projet très spécial. Je pense que le monde entier a vu et compris ce que l’album voulait communiquer : l’amour de Benito pour sa culture et pour le peuple latin. Je crois que cela a complètement changé la réception de l’album, en comparaison de ses précédents.
Ce projet semble être plus une œuvre de passion que tous les autres albums de Benito. Pensez-vous que cela a eu un impact sur l’obsession des gens pour cet album ?
Certainement. Benito a toujours exprimé son engagement et son amour pour Porto Rico. Mais ici, il a dédié tout un projet à son île, pas seulement conceptuellement mais aussi artistiquement, en misant sur des genres musicaux traditionnels et sur de jeunes talents locaux comme Los Sobrinos (un groupe d’étudiants de l’École Libre de Musique de Porto Rico) et Los Pleneros de La Cresta. Cela a amené les gens à voir le projet sous un autre angle et à l’apprécier encore plus.
Benito a fait plus de promo pour cet album que pour n’importe quel autre. Pourquoi ? Et comment l’avez-vous convaincu de le faire ?
Je pense sincèrement que sa connexion avec le projet a facilité tout le reste. Il voulait le faire de cette manière, soutenir la sortie de l’album comme il l’a fait. Notre travail doit résonner avec Bad Bunny, avec sa personnalité artistique et avec sa vision. Une fois cet équilibre trouvé, tout le reste s’enchaîne naturellement.
Pouvez-vous me donner des exemples de stratégies marketing que vous avez trouvées particulièrement efficaces ?
Notre stratégie pour révéler les titres des chansons a généré un engouement viral. Nous nous sommes associés à Google Maps et Spotify, et dans le cadre de cette collaboration, nous avons révélé les coordonnées de chaque chanson de l’album sur Spotify, incitant les fans à chercher dans Google Maps et découvrir les indices cachés. Nous avons non seulement trouvé une manière différente et interactive, mais elle a permis à de nombreuses personnes de découvrir différents lieux de notre île.
L’autre projet majeur était le court-métrage sorti juste avant l’album. L’histoire qu’il raconte est celle d’un homme âgé (interprété par le cinéaste et acteur Jacobo Morales), qui se souvient de sa vie et de son amour pour Porto Rico. Le film a été une excellente introduction à l’album.
C’était touchant et superbement réalisé (Bad Bunny était derrière la caméra). Cela a ému beaucoup de gens, à Porto Rico et partout ailleurs. De plus, ces courts extraits de différents morceaux inclus dans le film ont créé le débat sur les réseaux sociaux, faisant monter l’attente autour de l’album.
Cela vous surprend-il qu’un album aussi latin soit le plus consommé aux États-Unis ?
Plus qu’un « album latin », on entend vraiment les rythmes de Porto Rico dans ce disque. Je suis bluffée, et en tant que Portoricaine, ça me rend tellement fière. C’est un grand pas pour l’industrie musicale en général.
Quelle est la suite pour cet album ?
On ne s’arrête pas. Il y a plein de projets qui arrivent autour de l’album. Et évidemment, une série de concerts historiques à Porto Rico, qui sera vraiment spéciale pour tous ceux qui feront le déplacement.